La période que nous traversons est difficile pour tout le monde. Ce que nous vivons est inédit, et digne d’un scénario de mauvais film catastrophe. Les populations confinées, les hôpitaux débordés, les commerces (presque) tous fermés… qui aurait pu imaginer une telle situation il y a encore quelques mois ? Cette atmosphère anxiogène invite à une réflexion positive sur ce que cette crise révèle sur le secteur agricole.
Anne Pétré, directrice des relations publiques de la FWA, prend la parole.
Le métier d’agriculteur est difficile… La tension économique que connaissent nos fermes familiales est préoccupante, de même que la difficulté à trouver un repreneur pour beaucoup d’agriculteurs, sans mentionner les normes sévères et les contrôles qui les accompagnent et le poids du travail administratif.
La situation est loin d’être enviable pour ceux qui ont choisi ce beau métier.
Beau métier… le mot est lâché. Agriculteur… quel métier formidable ! La situation que nous traversons offre au moins cette opportunité: faire comprendre à quel point l’agriculture est aux sources mêmes de la sécurité des populations.
Rayons de supermarchés vidés
Chaque jour, les agriculteurs wallons assurent l’approvisionnement de nos concitoyens en nourriture. Nous n’y pensions plus: entrer dans un supermarché, trouver de tout, à un prix accessible, quoi de plus normal ? C’est la démonstration qu’au-delà de l’agribashing pesant ressenti ces derniers temps, les consommateurs savent qu’ils peuvent compter sur leurs agriculteurs.
Mais subitement, ce qui depuis longtemps était une évidence est devenu une source de stress. Ces derniers jours, certains rayons de nos supermarchés étaient vidés des habituels monceaux de denrées qu’on y trouve en temps normal.
La crise sanitaire du coronavirus nous rappelle que nous ne pouvons pas nous permettre d’être dépendants d’autres pays pour notre approvisionnement alimentaire.
Nos concitoyens ont eu peur de sortir, peur de manquer… La bonne nouvelle, c’est qu’ils ne manqueront de rien, parce que nous avons la chance d’avoir une agriculture ancrée dans son terroir, avec des filières qui transforment et commercialisent les produits de nos champs et de nos étables. C’est la preuve, s’il en fallait une, que la production alimentaire est essentielle, et que l’agriculture est un secteur stratégique qui doit compter dans les orientations politiques d’un pays, d’un continent.
Ne pas être dépendants d’autres pays
C’est pour cela, et aussi parce que la nature se réveille, faisant fi du confinement, que les agriculteurs constituent l’une des rares catégories de la population qui va poursuivre son travail presque comme d’habitude, en respectant les mesures de sécurité préconisées par nos autorités. Même si les difficultés économiques font courir des risques majeurs aux fermes familiales wallonnes…
La crise sanitaire du coronavirus nous rappelle que nous ne pouvons pas nous permettre d’être dépendants d’autres pays pour notre approvisionnement alimentaire.
Les agriculteurs sont conscients du rôle qu’ils ont à jouer dans la poursuite d’une dynamique vertueuse qui devra mener à encore plus de durabilité.
La PAC, fondée après la Seconde Guerre mondiale, intégrait à son origine ces ambitions fondamentales. Assurer la sécurité alimentaire de nos citoyens européens, en qualité et quantité, à des prix stables et abordables. Des ambitions que l’agriculture européenne a empoignées tant et si bien qu’elle a dû, plus tard, réduire sa production.
Encore plus de durabilité
Aujourd’hui, la lutte contre le changement climatique est un défi auquel les agriculteurs comptent bien participer pleinement.
À cet égard, notre agriculture wallonne part avec une belle longueur d’avance. Liée au sol, basée sur un modèle familial, avec des fermes de taille raisonnable (moins de 57 ha en moyenne), elle gère la moitié du territoire de la région en respectant des normes environnementales, de bien-être animal, de sécurité sanitaire, parmi les plus sévères du monde.
Pour autant, les agriculteurs wallons n’ont pas l’intention de se reposer sur leurs lauriers. Ils sont conscients du rôle qu’ils ont à jouer dans la poursuite d’une dynamique vertueuse qui devra mener à encore plus de durabilité.
Toutefois, ils ne pourront le faire sans s’appuyer sur un terrain économiquement plus sain, ni sans perspectives plus claire quant à l’avenir du cadre politique qui encadrera leur profession.