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Des jeux vidéo pour apprendre : pourquoi pas ?

Timidement, la Belgique francophone explore les moyens d’intégrer le jeu vidéo dans l’enseignement et la formation. Avantage de la méthode : elle développe de manière participative des compétences de savoir-être et de savoir-faire.

Texte : Philippe Van Lil

On reproche souvent aux jeux vidéo des aspects négatifs tels que leur violence ou leurs risques d’addiction. Pour Julien Annart, enseignant et Détaché pédagogique jeux vidéo auprès de la Fédération de maisons de jeunes et organisation de Jeunesse (FOr’J), ces deux aspects « sont en débat scientifiquement. Sauf pour la violence, question aujourd’hui contredite par les études sur le sujet. »

Notre interlocuteur estime que ces reproches masquent en fait d’autres réalités, notamment celle du modèle économique : « Celui de Facebook, par exemple, est basé sur l’économie de l’attention : ce réseau met tout en œuvre pour garder l’utilisateur le plus longtemps possible en ligne, le soumettre ainsi à la publicité et lui extraire le plus de données possible. Beaucoup de jeux en ligne prétendument gratuits – les fameux Free-To-Play ou F2P – fonctionnent sur ce même principe hautement questionnable. »

De vrais jeux pour de vrais enjeux

Les jeux vidéo utilisés pour l’apprentissage sont évidemment très différents. Chaque enseignant passe d’ailleurs énormément de temps à sélectionner les jeux qui correspondent le mieux à ses objectifs pédagogiques.

« Certains enseignants vont jusqu’à développer eux-mêmes leur propre jeu », précise Julien Annart. « Toutefois, il est très difficile de proposer quelque chose d’aussi attractif qu’un produit développé par un studio professionnel. À une époque, on a développé le concept de ‘serious gaming’ à visée pédagogique mais ces jeux étaient souvent plus rébarbatifs que ludiques et plus grand monde ne s’y intéresse. »

Julien Annart




« Le jeu vidéo n’est pas une solution miracle, c’est un support supplémentaire sur lequel l’enseignant peut s’appuyer. »

Julien Annart

Détaché pédagogique de jeux vidéo FOr’J

Aujourd’hui, l’idée est de se réapproprier des jeux vidéo développés pour leur authentique pouvoir ludique et de les utiliser dans le cadre d’un apprentissage. Il peut s’agir de jeux commerciaux, de jeux à prix libres – souvent téléchargeables gratuitement -, accessibles en ligne ou non.

« Dans un jeu tel que la création britannique ‘Overcooked’, quatre joueurs doivent parvenir à cuisiner un maximum de plats. Ce jeu permet de développer la compétence essentielle qu’est la collaboration vu que les joueurs peuvent cuisiner plus s’ils parviennent à coordonner leurs actions. Au-delà de ça, il permet d’introduire une réflexion plus générale sur la citoyenneté, la politique et les enjeux du pouvoir en questionnant les interactions sociales et l’organisation des joueurs. Qu’est-ce que la démocratie, l’autogestion, l’autoritarisme ? »

Le jeu reste un support

Comme le rappelle Julien Annart, « le jeu vidéo n’est nullement une solution miracle ! Il reste un simple support. À ce titre, les enseignants et encadrants conservent leur rôle crucial. L’accompagnement et la mise en œuvre d’une dynamique au sein de la classe ou du groupe restent incontournables. »

Les universités, hautes écoles et établissements d’enseignement continué se montrent les plus demandeurs de ce type d’apprentissage. Pour l’heure, en Belgique francophone, seules quelques institutions comme EduLAB au sein de Technofutur à Charleroi ou l’Atelier-Édu à Mouscron proposent des ateliers, notamment à destination des enseignants.

Droit à l’erreur

Le jeu vidéo n’est pas pour autant totalement absent de l’enseignement traditionnel. « Néanmoins, estime notre interlocuteur, il ne correspond pas entièrement à la logique qui y prévaut : avec le jeu vidéo, existe le droit à l’erreur, qui constitue déjà un apprentissage en soi. »

« L’énorme problème de notre enseignement, c’est qu’il est fondé sur la sélection, l’échec et la réorientation. Si un enfant apprend à rouler à vélo, aucun parent responsable ne va lui dire de passer aux patins à roulettes la première fois qu’il tombe. Or, c’est la base de notre enseignement : dès qu’un enfant est en échec, on le réoriente. C’est l’une des raisons principales de ses résultats catastrophiques. »

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