Reconnu de longue date sur la scène internationale, l’écosystème belge des sciences de la vie – biotechs, medtechs, pharmaceutique, etc. – a connu de belles avancées ces dernières années. Le secteur est aussi victime de son succès : il fait face à une pénurie de main-d’œuvre. Ce défi et bien d’autres, comme la digitalisation et les normes environnementales, ont fait l’objet d’une table ronde organisée par Mediaplanet début septembre. Compte rendu.
Quelles sont les évolutions récentes dans votre secteur d’activité ?
Sophie Gravy : « En tant que bureau de recrutement spécialisés pour les PME actives dans les biotechs et medtechs, nous constatons une nouvelle tendance : nous sommes de plus en plus souvent sollicités par des entreprises étrangères avant même qu’elles ne décident d’investir, de venir s’installer et de développer leurs projets en Wallonie ou en Flandre. Elles veulent savoir que ce que nous pouvons leur offrir en termes de main-d’œuvre et ce que cela leur coûtera. Une autre tendance récente est la capacité accrue des petites structures medtechs et biotechs à attirer des profils extrêmement spécifiques en provenance de l’étranger. Ces secteurs sont en forte demande de main-d’œuvre, non seulement pour des profils très pointus mais aussi plus standards. »
Sylvie Ponchaut : « C’est tout à fait exact. En 15 ans, en Wallonie, l’emploi a doublé dans le secteur, passant de quelque 9.000 à près de 18.000 emplois directs équivalents temps plein. Si on ajoute les emplois indirects, on est à 50.000 équivalents temps plein. On compte quatre grandes filières : le secteur pharma, la medtech, la radiopharmacie et la santé digitale. Dans le pharma, le secteur biopharmaceutique développe essentiellement des ‘biologics’ – des médicaments issus du vivant – et des vaccins. Il y a là bien sûr une forte empreinte de GSK, mais aussi beaucoup de plus petites structures actives dans la recherche et le développement de biomédicaments – anticorps monoclonaux, produits de thérapies cellulaires ou géniques ; elles performent dans la production industrielle de ces produits, avec une consolidation de beaucoup de CDMO (Contract Development Manufacturing Organizations). »
Il faut une collaboration bien plus intense entre entreprises et universités, à l’instar de ce qui se fait en France ou en Allemagne.
Sophie Gravy
Stefaan Fiers : « Insistons sur ce point : la Belgique est dans le cockpit de l’innovation biopharmaceutique, sur le plan européen mais aussi mondial. Notre entreprise, Takeda, dispose de sa troisième plus grande implantation au monde à Lessines, avec 1.200 employés, et est à la pointe de l’innovation dans les hautes technologies. Ceci notamment car l’écosystème belge est unique : il développe toutes les activités de la chaîne biopharmaceutique, de la recherche de base – via la recherche clinique – jusqu’à la production et la distribution des médicaments. D’autres pays se focalisent souvent sur une seule activité. Comme vous le soulignez, cet écosystème rassemble de grandes entreprises qui, autour d’elles, contribuent au développement de nouvelles startups, PME, etc. Des initiatives comme Biowin permettent aussi de faire le lien entre les universités, les entreprises et, plus largement, la société. »
Éric Halioua : « Le lien que vous établissez entre universités et entreprises est primordial. Présente à Liège, notre société, PDC Line Pharma, est active dans le domaine du vaccin contre le cancer et dans celui de la thérapie cellulaire. Elle est une spin-off de l’Établissement français du sang, un organisme qui dispose aussi de centres de recherche fondamentale académique associés. Nous avons décidé de la développer en Belgique car il existe ici une main-d’œuvre particulièrement compétente, un écosystème dense, ainsi qu’un large réseau, notamment financier pour les investissements, qu’ils soient publics ou privés. Notre entreprise n’est pas la seule à être attirée par l’écosystème belge. Ces dernières années, de grandes entreprises américaines sont venues acquérir des sociétés ou prestataires de services basés en Belgique pour y implanter une très forte activité. Ceci illustre l’excellence belge, entre autres dans le domaine des thérapies cellulaires et géniques. »
Sylvie Ponchaut : « Cette excellence est également présente dans la medtech, soit la filière des dispositifs médicaux. Celle-ci compte aussi de plus en plus d’expertise et de sociétés, dont certaines listées sur Euronext ou au NASDAQ, mais cette filière, encore émergente, mérite d’être consolidée. Du côté de la radiopharmacie, la Belgique a une forte tradition dans le nucléaire médical, avec de grosses structures comme IBA ou de plus petites comme Trasis, mais avec, de nouveau, une masse critique d’expertise. Pour sa part, la filière de la santé digitale est composée d’un grand nombre de petites sociétés qui développent par exemple des applications ou des solutions de support diagnostic. À côté des quatre grandes filières, il y a aussi tout un portefeuille de sociétés de services qui développent des solutions innovantes pour cet écosystème industriel. »
Ces dernières années, de grandes entreprises américaines sont venues acquérir des sociétés basée en Belgique pour y implanter une très forte activité : ceci illustre l’excellence belge.
Eric Halioua
Benoît Autem : « Pour notre part, nous sommes un acteur des medtechs que vous évoquez, plus particulièrement dans la partie diagnostic. Notre société a été créée il y a plus de 25 ans, plus ou moins en même temps qu’une dizaine d’autres sociétés wallonnes de ce secteur. Il n’y a plus d’équivalent en Flandre. Aujourd’hui, les défis qui se présentent à toutes ces petites structures comme la nôtre – nous sommes 20 équivalents temps plein – sont les mêmes que ceux des grandes structures – digitalisation, etc. -, si ce n’est que nous devons les gérer nous-mêmes en interne, en plus de nos missions habituelles ; nous ne disposons évidemment pas des mêmes moyens humains et budgétaires. Heureusement, nous bénéficions, nous aussi, de l’écosystème auquel vous faites référence, notamment de partenaires et d’investisseurs prêts à faire bouger un peu les lignes. »
Sabine Carlino : « Il est vrai que la Belgique présente de nombreux attraits pour un investisseur étranger. C’est aussi le cas pour notre société, Catalent, un groupe pharmaceutique composé de 19.000 personnes. Elle s’est établie à Gosselies pour être active dans le secteur des thérapies cellulaires et géniques, avec un accent particulier sur la thérapie cellulaire et la fabrication de plasmides. Ce qui l’a motivée, c’est notamment que la Belgique se situe dans le Top 3 des pays européens en matière d’études cliniques. En 2020, il y en a eu 503 confirmées, avec des dépenses à hauteur de 5 milliards en R&D. Une autre force du pays est la qualité de sa formation grâce à la présence de pas moins de 12 universités. Elles forment des profils très pointus dans les domaines des sciences et de la recherche. Enfin, un autre attrait est la fiabilité à l’égard de l’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé ; les investisseurs étrangers ont confiance dans les conseils et les approbations d’autorisation de mise sur le marché de cette autorité de régulation. »
La montée en puissance des aspects réglementaires risque de freiner la capacité d’innovation de petites structures comme la nôtre et augmente le risque de délocalisation de la production hors de Wallonie.
Benoît Autem
Benoit Moreaux : « Vous avez raison, pour démarrer une activité, les investisseurs sont relativement faciles à trouver en Belgique. En réalité, le pays a, comme vous le rappelez, de nombreux atouts. Rien qu’en Wallonie, on bénéficie par exemple de trois grands pôles d’activités, à Gosselies, Liège et Louvain-la-Neuve, avec une multitude de startups et d’entreprises spécialisées. Si l’on se penche sur ce qui s’est produit durant la crise sanitaire, on peut être fier de la Belgique, car quel pays au monde a produit dès le départ les vaccins de Pfizer et d’AstraZeneca ? Cela s’est passé chez nous, sur le site de Puurs et à Seneffe. Cet événement renforce encore plus notre visibilité sur la scène internationale dans le monde pharma. »
La pénurie de talents est un fait. Comment y remédier ?
Stefaan Fiers : « Pour rester à la pointe, il y a une nécessité de formation continue de nos collaborateurs aux métiers de demain. Dans notre environnement, les choses bougent constamment. Il faut accroître la polyvalence et former à de nouvelles compétences, notamment digitales. »
Benoit Moreaux : « C’est exact car le manque de talents constitue déjà un frein à la croissance. Le nombre de postulants pour les postes vacants est souvent très limité. Nombre de sociétés ne parviennent même plus à réaliser leur business plan par manque de personnel. S’il est vrai que le ‘vieux’ secteur de la pharmacie classique n’attire plus beaucoup les jeunes vers les études scientifiques, d’autres secteurs, comme la culture cellulaire ou la santé digitale, devraient pouvoir les inciter à s’orienter vers les domaines du biomédical. Pour l’heure, afin de faire face à la pénurie de main-d’œuvre, nous allons les chercher à l’étranger. La Belgique étant un pays accueillant, la tâche n’est pas encore trop compliquée. »
Éric Halioua : « Quand on n’arrive pas à trouver en Belgique les compétences nécessaires, il est clair que l’international, en particulier les pays limitrophes, représente une source importante. Notre PME a notamment pu trouver des profils de techniciens et d’ingénieurs en France. Le fait qu’ils parlent la même langue que nous facilite leur délocalisation. »
Sophie Gravy : « On a parlé de la qualité de notre enseignement. J’émettrais quand même un bémol. S’il est vrai qu’il existe un écosystème efficace mixant divers acteurs qui contribuent à la mise à l’emploi, c’est nettement moins le cas avec les universités, qui donnent l’impression de rester dans leur tour d’ivoire. Quand nous discutons avec les professeurs des filières scientifiques et technologiques et les personnes en charge des programmes universitaires, ils nous expliquent qu’ils n’ont pas vocation à créer leurs cours en fonction des besoins du marché. Ils en sont donc tout à fait déconnectés. Les cours sont axés autour de la R&D et non autour des métiers en forte demande comme les profils cliniques ou régulatoires. Les universités devraient former davantage leurs professeurs et étudiants à la chaîne de développement d’un médicament ou d’un biologique et aux métiers associés à chaque étape de ce processus. Il faut une collaboration bien plus intense entre entreprises et universités, à l’instar de ce qui se fait en France ou en Allemagne. »
La Belgique a démontré son savoir-faire en produisant un milliard de doses de vaccin durant la crise et l’écosystème se porte bien.
Stefaan Fiers
Sylvie Ponchaut : « Il y a effectivement une réelle difficulté d’ouvrir les formations de base aux réalités des recherches industrielles ou de production. Toutefois, nombre d’initiatives sont déjà menées pour sensibiliser les jeunes aux carrières scientifiques. Essenscia, la fédération de la chimie et des sciences de la vie, mène par exemple des actions avec des intervenants issus des universités et des hautes écoles. Le problème, c’est que ce sont là des solutions à long terme. Or, il y a le feu au lac ! Il faut dès lors poursuivre les efforts déjà menées dans la formation continue ; il en existe beaucoup et la plupart sont très pertinentes, mais elles ne sont pas alignées sur le plan stratégique et opérationnel ; l’écosystème liégeois a ses propres initiatives, le Brabant wallon et la Flandre ont les leurs. Mentionnons aussi une autre initiative positive : l’EU Biotech Campus, qui verra le jour à Gosselies en 2025. Grâce à des financements européens, ce centre de formation multi-opérateurs de pointe sera doté d’un accélérateur d’entreprises. D’ici là, vu l’urgence, le pôle de compétitivité Biowin, à la demande de ses membres, pilote un consortium public-privé d’envergure nationale avec plusieurs objectifs : développer des ‘quick wins’ avec le Forem et les établissements de formation continue ; standardiser les processus de recrutement ; centraliser l’offre et la demande pour faciliter la recherche de candidats ; favoriser les reconversions et le recrutement à l’étranger ; etc. »
En 15 ans, en Wallonie, l’emploi a doublé dans le secteur, passant de quelque 9.000 à près de 18.000 emplois directs équivalents temps plein.
Sylvie Ponchaut
Stefaan Fiers : « Les pénuries de talents que nous évoquons tous en ce moment sont répandues dans tous les secteurs, pas seulement dans l’industrie pharmaceutique. Trois pistes pourraient mener à des solutions. Un : dans le cadre du rapprochement des mondes de l’enseignement et de l’entreprise, il faut non seulement plus d’esprit d’ouverture dans les universités, mais aussi plus de chefs d’entreprise prêts à témoigner de ce qui se passe derrière les murs de leurs installations. Deux : il faut beaucoup plus mutualiser les profils. Quelques entreprises le font déjà ; c’est un win-win, tant pour elles que pour les employés. Trois : il faut faciliter le recrutement et la mobilité intra-européenne, mais aussi au-delà. Lorsque notre entreprise dispose par exemple d’un spécialiste en Italie pour certaines machines ou procédures, il vient former notre personnel à Lessines. Le gouvernement fédéral a fait des pas énormes pour faciliter cette mobilité mais il faut la renforcer. »
Sabine Carlino : « Outre les interactions entre entreprises et universités ou hautes écoles, il faut aussi favoriser celles avec les jeunes de moins 18 ans pour susciter des vocations. Il s‘agit de leur présenter les différents métiers du secteur, qui ne se limitent pas seulement à de la R&D et à des profils de scientifiques et d’ingénieurs. Organiser des journées portes ouvertes en entreprises ou des présentations dans les écoles par les managers font partie des pistes à intensifier. »
Éric Halioua : « Même si le marché est plus tendu, je veux rester positif : on arrive à trouver de la main-d’œuvre, en tout cas au niveau d’une PME comme la nôtre. Bien sûr, nous ne sommes pas dans le cas de figure de ces sociétés qui ont récemment cherché à embaucher 300 personnes. L’une des pistes que nous mettons en œuvre est d’anticiper bien à l’avance nos perspectives de croissance et ensuite de travailler avec des partenaires sélectionnés pour nous aider à trouver les bons profils, y compris les plus pointus comme des profils médicaux ou réglementaires. Une autre piste importante est de travailler sur la rétention du personnel, tout en formant les plus jeunes pour qu’ils soient en mesure de remplacer les personnes qui quittent la société. »
Benoît Autem : « Il faut en effet former les jeunes mais cela prend beaucoup de temps, tout comme le fait de devoir accompagner ceux qui, au sortir de leurs études, entrent dans une entreprise pour la première fois. Très souvent, il faut commencer par les rassurer car ils sont face à un boulot pour lequel ils n’ont pas été formés et qu’ils n’imaginaient même pas. À la sortie des études, ils ont bien sûr un bagage mais ils ne savent pas toujours où aller trouver des solutions dans leur boîte à outils. À l’origine, le souci principal réside, comme cela a déjà été dit, dans le manque de communication entre entreprises et universités. C’est à un point tel qu’aujourd’hui, lorsqu’un étudiant ou un chercheur a une bonne idée, on le pousse quasi systématiquement à créer sa spin-off et beaucoup moins à entrer en contact avec une société déjà existante. Or, peu d’entre eux s’avèrent être de bons chefs d’entreprise. »
Sabine Carlino : « Investir dans la formation est effectivement essentiel. Notre entreprise a décidé d’acquérir un bâtiment qui y sera entièrement dédié. D’ici un an, il sera le centre européen d’excellence en thérapie cellulaire. Nous y formerons entre autres notre propre personnel aux nouveaux métiers. Le fait d’ouvrir ce centre à une échelle européenne nous permettra aussi de repenser certains critères de base dans la sélection des candidats ; il ne faut pas nécessairement une expérience accrue dans le domaine pharmaceutique pour accéder à certains métiers. Ceci permettra d’élargir le panel des candidats potentiels. »
À quels défis majeurs, vos secteurs respectifs devront-ils faire face dans les années à venir ?
Éric Halioua : « L’un des principaux est que la Belgique dispose d’une vision et d’un plan stratégique intégré à long terme, alignant les initiatives des différents partenaires publics et privés afin de passer à un stade de maturité et de croissance supérieur. Pour cela, il faudra casser les silos existants. Un autre challenge est de continuer à investir, via les secteurs public et privé, notamment en renforçant les fonds d’investissement de capital-risque et en invitant les business angels à investir davantage dans nos domaines d’activité. »
Stefaan Fiers : « Je suis très optimiste pour l’avenir de notre secteur. La Belgique a démontré son savoir-faire en produisant un milliard de doses de vaccin durant la crise et l’écosystème se porte bien. Il est bien soutenu par les autorités, notamment au travers de l’initiative R&D bioplatform. Mise sur pied par le gouvernement fédéral et les représentants du secteur biopharmaceutique, elle fera la promotion de la Belgique à l’international sur la base de thématiques comme les études cliniques. Cela nous permettra aussi d’attirer de nouveaux investissements. »
En tant qu’entreprise pharmaceutique, notre responsabilité sociétale est de fournir des médicaments fiables sur le plan de la santé et abordables sur le plan financier.
Sabine Carlino
Sylvie Ponchaut : « Les défis auxquels notre secteur sera confronté sont nombreux : intégrer le digital dans nos entreprises ; mettre tout en œuvre pour diminuer l’empreinte carbone de nos entreprises ; rendre les innovations pharmaceutiques accessibles à tous. Il faut être conscient de nos handicaps, comme l’absence de masse critique vu la taille de notre pays ou la difficulté de rentrer dans la course face aux grands pays en raison de notre capacité financière limitée. Mais il faut être tout aussi conscient de nos atouts : le support des gouvernements, la présence de grands groupes pharmaceutiques au sein de l’écosystème ainsi qu’une capacité exceptionnelle d’innover et de produire industriellement des médicaments innovants. »
Sophie Gravy : « Je vous rejoins sur ce point : nous devons continuer d’être présents de manière très pointue dans la R&D, les études cliniques et, de plus en plus, en manufacturing au travers des CDMO, qui permettent d’être indépendants localement. Mais les défis restent importants en matière d’investissements financiers et de recherche de personnel. Alors qu’auparavant, elle ne concernait que des profils spécifiques, la pénurie de main-d’œuvre touche désormais de très nombreux profils, de la secrétaire à l’ingénieur. Le CDI ne doit pas rester la norme, il faut repenser les statuts et la manière d’aborder le travail via diverses formules : l’intérim management, la consultance, les free-lances, la mutualisation de compétences pour diverses sociétés, le télétravail depuis l’étranger… Un autre frein en Belgique est le coût extrêmement élevé du travail. »
Benoit Moreaux : « Je suis également positif quant à l’avenir. La Wallonie dispose de centres d’excellence et de la présence de grandes multinationales. Si celles-ci sont le signe d’une reconnaissance certaine, elles ne sont toutefois pas aussi rapides en matière d’innovation que les petites startups, biotechs et medtechs. Il faut veiller à ce que ces dernières puissent continuer à bénéficier de financements suffisants des gouvernements et d’autres acteurs afin de développer les connaissances et de nouveaux médicaments pour les pathologies. Sans cela, la Wallonie sera réduite à n’être plus qu’une zone de production. Pour le secteur pharma, un autre challenge essentiel est la maîtrise de la consommation et des coûts de l’eau, du gaz et de l’électricité, dont il est un grand consommateur. Il faut aussi pouvoir produire des médicaments dont les prix sont abordables pour tout le monde. »
Sabine Carlino : « J’abonde dans votre sens : en tant qu’entreprise pharmaceutique, on a une responsabilité sociétale en termes d’environnement. Nous devons aussi miser sur les énergies renouvelables. L’autre responsabilité sociétale est de fournir de fournir des médicaments fiables sur le plan de la santé et, comme vous le dites, abordables sur le plan financier. Un autre défi sera de réduire le temps pour produire ces médicaments. Aujourd’hui, quand on identifie une molécule potentiellement à usage thérapeutique, il faut environ 10 ans pour la voir apparaître comme médicament, compte tenu aussi des autorisations de mise sur le marché. Le big data et l’intelligence artificielle nous donne un grand espoir de réduire ce délai, ce qui permettra aussi de réduire les coûts de production. »
Il faut veiller à ce que les startups, dont la capacité d’innovation est immense puissent continuer à bénéficier de financements suffisants des gouvernements et d’autres acteurs.
Benoit Moreaux
Benoît Autem : « Je reste aussi un éternel optimiste même si j’ai d’énormes inquiétudes, en particulier dans le secteur des medtechs. Celui-ci est composé d’énormément de petits acteurs comme nous qui sommes actifs dans le segment du diagnostic. Or, depuis 5 ou 6 ans, ils font face à une montée en puissance des aspects réglementaires. Cela risque de freiner notre capacité d’innover, alors que durant la crise du Covid, c’est bien la Wallonie qui, en Europe, a sorti les premiers tests de diagnostic. À terme, de grands acteurs du diagnostic pourraient très bien venir racheter à bon prix une série de petits acteurs medtechs wallons et délocaliser notre production à l’étranger. »