En Wallonie, la mission des opérateurs publics du secteur de l’eau est d’assurer l’approvisionnement de celle-ci aux citoyens et aux entreprises et le traitement des eaux usées à un coût abordable. Pour la rencontrer, ils se sont dotés d’un plan industriel ambitieux à l’horizon 2030. Il est assorti de multiples contraintes.
Un nouveau décret de gouvernance est en cours d’élaboration au sein du gouvernement wallon. Il est destiné à officialiser le rapprochement entre la Société wallonne des eaux (SWDE) et la Société publique de gestion des eaux (SPGE). La première est responsable de la production et de la distribution d’eau, tandis que la seconde coordonne et finance les opérateurs chargés de la collecte et de l’épuration des eaux usées, essentiellement des structures communales ou intercommunales.
Comme le rappelle Eric Van Sevenant, Président du Comité de direction de la SWDE et de la SPGE, ce rapprochement est en cours depuis trois ans déjà : « Il intègre un tronc commun aux contrats de gestion qui lient chacun de ces deux opérateurs au gouvernement wallon. Désormais, leur objectif conjoint est d’élaborer un plan d’avenir pour le secteur de l’eau à l’horizon 2030.
Concrètement, le plan industriel que nous avons déjà défini prévoit entre autres des investissements cumulés de 2 milliards d’euros d’ici là. Si on combine tous les opérateurs du secteur, on arrive à des montants d’investissement sur les infrastructures proches de 300 millions d’euros par an. Globalement, en tenant compte également de la commande de biens et services, nous sommes donneurs d’ordre dans une fourchette de 500 à 600 millions d’euros par an. »
Ces investissements s’inscrivent dans le cadre de la stratégie régionale Résilience Sécheresse. Elle a été déployée à la suite des longues périodes sans pluie que nous avons connues ces dernières années.
Une filiale IT
Un des aspects déjà concrétisés de ce rapprochement est la création le 1er avril de Digit’Eaux. « Cette filiale IT mutualise toutes les ressources informatiques et tout le personnel nécessaire pour l’ensemble du secteur de l’eau. Cette taille critique permet d’assurer notre transformation digitale, ce qui est essentiel vu le nombre important d’installations – du captage jusqu’à l’épuration de l’eau – et donc de données que devons gérer. » Sur le terrain, un projet du plan de relance vise à mutualiser, avec les autres opérateurs, l’expertise acquise par la SWDE dans l’amélioration de la performance des réseaux.
Les 3.000 compteurs intelligents permettent de monitorer en temps réel les volumes qui transitent par les infrastructures dont une bonne partie est enterrée.
« Nous avons déployé 3.000 compteurs intelligents, répartis sur les 28.000 km de canalisations de notre réseau. Ils permettent de monitorer en temps réel les volumes qui transitent par les infrastructures, dont une bonne partie est enterrée et donc non contrôlable visuellement. Nous ciblons ainsi très rapidement les endroits qui présentent des défectuosités comme des fuites et où il faut opérer des réparations. On garantit ainsi une utilisation parcimonieuse des ressources, la continuité d’alimentation de nos clients et on évite des dégradations importantes de nos infrastructures », précise notre interlocuteur.
Transition énergétique
L’IT est loin d’être le seul challenge majeur du secteur de l’eau. La transition énergétique en est un autre. Comme le relève Eric Van Sevenant « ce défi présente de multiples facettes. L’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre se combine à la hausse importante des coûts de l’énergie, en particulier depuis l’an dernier.
D’un côté, par leur nature même, les activités de la SWDE et de la SPGE leur imposent de maîtriser leur impact environnemental pour assurer la pérennité des ressources en eau. De l’autre, nous devons continuer de pouvoir fournir cette ressource au coût le plus raisonnable possible pour tout un chacun. » À ce propos, il souligne que malgré la pression inflationniste, le coût de l’eau est resté inchangé en Wallonie depuis 2017. Du côté des projets en cours, le président du comité de direction mentionne sa volonté de mettre en place une communauté d’énergie à l’échelle sectorielle, comme la loi en aménage désormais la possibilité. « Le secteur de l’eau est d’ores et déjà le 4 e producteur d’hydroélectricité du pays. En parallèle, il a déjà déployé une centaine de champs de panneaux photovoltaïques et il est aussi actif dans le domaine éolien ». En outre, des unités de valorisation énergétique sont à l’étude pour valoriser les boues générées par les stations d’épuration.
Besoins de main-d’œuvre
Pour réaliser toutes ses missions et relever autant de défi s, le secteur de l’eau a bien entendu besoin de main-d’œuvre. Comme d’autres secteurs, il est toutefois confronté à des pénuries de talents. D’autant plus que de bon nombre de collaborateurs partiront à la pension dans les prochaines années et qu’il n’existe aucune formation spécifique dans l’enseignement traditionnel pour certains des métiers du secteur. Dès lors, la SWDE a modernisé ses méthodes de recrutement, entre autres avec une présence sur les réseaux sociaux ou à des salons de l’emploi. Elle aussi noué des partenariats avec le Forem, ainsi qu’avec des entreprises de génie civil qui réalisent des travaux d’infrastructure en sous-traitance.